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Epave moderne Laurons XI

Fouille de l’épave moderne Laurons XI / Cliché : L. Roux (CNRS, CCJ)

Localisée à Martigues (Bouches-du-Rhône) dans l’anse des Laurons, l’épave moderne Laurons XI fait l’objet d’un programme de fouilles porté conjointement depuis 2021 par plusieurs partenaires institutionnels et scientifiques. Peu profonde, proche du bord et remarquablement conservée, cette épave constitue un support idéal à l’organisation du chantier-école annuel des étudiants inscrits en deuxième année du Master d’archéologie maritime et côtière d’Aix-Marseille Université.

L’anse des Laurons, un fort potentiel archéologique

Documentée depuis les années 1970 par les travaux de Serge Ximénès et de Martine Moerman (association Groupe de recherche archéologique sous-marine), puis de Jean-Marie Gassend (CNRS), l’anse des Laurons offre un potentiel archéologique particulièrement riche. Neuf épaves y ont déjà été localisées : quatre sont antiques (Ier siècle av. – IVe siècle ap. J.-C.) et cinq sont non datées ou contemporaines. Une grande villa romaine est également présente sur le littoral immédiat (Ier siècle av. – Ve siècle ap. J.-C.).

Au cours des années précédentes, plusieurs structures immergées ont aussi fait l’objet de fouilles dans le cadre des activités pédagogiques du Master d’archéologie maritime et littorale (MoMArch). Il s’agit notamment d’un dépotoir et d’aménagements portuaires antiques (brise-lame et jetée). Dans ce cadre, un quai construit à sec en caisson (« quai E »), présumé antique depuis les années 1980, a également été ré-étudié et finalement daté de la période moderne (post-1650) par une série d’analyses 14C.

L’épave Laurons XI

L’épave Laurons XI est découverte et déclarée en 2010 lors d’une prospection dirigée par Bertrand Maillet (association Ampevas), toute proche du bord et à moins de 2 mètres de profondeur, à proximité immédiate du quai E mais sans qu’aucune connexion ne soit établie avec celui-ci.

Le chantier-école de deuxième année du Master MoMArch, consacré depuis 2021 à Laurons XI, a rapidement révélé la nature exceptionnelle de cette épave, tant par son état de conservation que par son intérêt scientifique, dont les datations expriment une fourchette haute autour de 1630. Longue d’environ 12 m et large d’environ 4 m, le mobilier qui lui est associé, en particulier un panier de rameaux tressés – restauré avec le soutien financier de la mairie de Martigues – et un maillet en bois aux dimensions impressionnantes (longueur du manche : 83,3 cm, largeur de la tête : 18 cm) laisse penser que l’embarcation avait des fonctions en lien avec la pêche. Le panier aurait ainsi pu servir, après comparaison avec des exemples connus du XXe siècle, au rangement de lignes de pêche ou à la conservation de poissons. Quant au maillet, ses dimensions suggèrent qu’il était utilisé pour des tâches particulières, comme pour enfoncer des pieux de pêcheries fixes. De tels aménagements semblent avoir existé dans cette zone d’après les archives, et les nombreux pieux découverts à proximité de l’épave pourraient aller dans le sens de cette théorie.

L’architecture navale témoigne également de l’intérêt de l’épave. Le nombre d’analogues connus pour les XVe-XVIIe siècles est faible en Provence, très peu de données techniques et textuelles subsistent pour ces petites embarcations côtières associées à un contexte régional et littoral, et la diversité de leurs assemblages demeure dès lors encore mal connue. Ainsi, de part son exceptionnel état de conservation, Laurons 11 constitue un véritable laboratoire d’étude des méthodes et des traditions de construction navale de cette époque. Les vestiges conservés montrent un assemblage à franc-bord du bordé, fixé aux membrures exclusivement par des carvelles de fer, renvoyant à la tradition d’assemblage méditerranéenne. L’interprétation indique également que la construction a été réalisée en suivant le principe de « membrure première », à savoir que les membrures sont les premiers éléments mis en place. Le pont, également conservé dans une part significative, montre la présence d’écoutilles servant au chargement et au stockage de matériel ou d’une petite cargaison. La fouille des parties situées sous le pont reste à prévoir, mais elle laisse espérer la découverte de plus de matériel de bord, ce qui permettrait alors de mieux déterminer la nature et la fonction de l’embarcation.

En parallèle de la fouille de l’épave, des actions de médiation à destination des publics, notamment scolaires, ont été mises en place par l’équipe à partir de 2023 en partenariat avec la mairie de Martigues pour sensibiliser la population à la richesse du patrimoine littoral local.

La poursuite de l’opération offre des perspectives prometteuses pour mieux comprendre la fonction de l’embarcation et enrichir nos connaissances sur l’architecture navale côtière en Provence à la période moderne. Ces activités scientifiques jouent aussi un rôle clé pour la formation de la nouvelle génération d’archéologues maritimes au travers du Master MoMArch.

 

Fouille de l’épave moderne Laurons XI (Martigues) / Cliché : L. Roux (CNRS, CCJ)

Panier en osier découvert dans l’épave / Cliché L. Roux (CNRS, CCJ)

Vue aérienne de l’épave moderne Laurons XI / Cliché E. Berry (DRASSM)

Atelier de médiation auprès des écoles primaires de la commune de Martigues / L. Roux (CNRS, CCJ)

 

Prélèvement des bois de l’épave pour étude à terre / Cliché L. Roux (CNRS, CCJ)